Accès aux filières bilingues

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT – Question n° 2578 adressée au Ministre de l’Éducation nationale

Question soumise le 07/08/2012
Réponse publiée le 06/11/2012

Texte de la question

M. Paul Molac attire l’attention de M. le ministre de l’Éducation nationale sur la répartition des frais de scolarité entre la commune de résidence d’un enfant et la commune où il est scolarisé dans une filière bilingue français-langue régionale. Les classes bilingues français-langue régionale ont été créées à partir de 1982 par la circulaire Savary. Ces classes sont considérées par l’Éducation nationale comme pouvant accueillir des enfants de communes différentes selon la demande des parents. Jusqu’en 2005, l’inscription d’un enfant en classe bilingue français-langue régionale était considérée par le ministère comme un cas dérogatoire bien qu’il n’ait jamais été mentionné comme tel dans l’article L. 212-8 du code de l’éducation. La commune de résidence était alors obligée de participer aux frais de scolarité et en cas de refus de celle-ci le préfet intervenait. Cette tolérance permettait aux parents de pouvoir inscrire leur enfant en classe bilingue (français-langue régionale) et, pour les maires des communes d’accueil qui avaient fait l’effort de créer une classe bilingue, de percevoir des frais de scolarité.
En 2005, cette interprétation fut modifiée. Les inscriptions en classe bilingue ne furent plus considérées comme des cas dérogatoires et les maires des communes de résidence ne furent plus tenus de participer aux frais de scolarité. Les maires des communes d’accueil se sont alors mis à refuser les inscriptions en classe bilingue. Certains parents se sont vus opposer un refus d’inscription sous le prétexte que la commune où ils habitaient refusait de participer aux frais de scolarité.
La jurisprudence oblige pourtant les maires à inscrire les enfants des autres communes s’il reste des places disponibles dans leurs écoles. Cette situation est source de nombreux problèmes. Elle limite l’accès en classe bilingue pour de nombreux enfants. Elle provoque des procédures judiciaires lorsque les maires refusent d’inscrire les enfants. Elle induit des tensions entre les familles et les mairies et entre certaines mairies entre elles. Enfin, elle fragilise certaines écoles.
L’école de Saint-Rivoal (Finistère) ne doit sa survie qu’au fait qu’elle propose une classe bilingue et ce depuis 1982. La municipalité a des capacités financières très limitées. Le budget de la commune est mis à mal par les refus des communes alentour de participer aux frais bien qu’elles ne proposent pas de scolarité bilingue. Devant cette situation conflictuelle qui n’est hélas pas un cas isolé en Bretagne et que l’on retrouve dans de nombreux endroits en France, il souhaite que la demande des parents soit reconnue et l’accès aux classes bilingues publiques sécurisé. Selon les dernières informations, certaines préfectures considèrent de nouveau que l’existence d’une classe bilingue doit être prise en compte pour définir la capacité d’accueil. Ce retour à la situation d’avant 2005 a été très bien accueillie par les parents.
Toutefois, il conviendrait de sécuriser juridiquement cet accès aux classes bilingues. La meilleure solution serait d’inscrire un 4e cas de dérogation dans l’article L. 212-8 du code de l’éducation qui permettrait aux parents un libre accès aux classes bilingues pour leurs enfants et l’assurance pour les communes d’accueil d’une participation aux frais de scolarité. En attendant la ratification de la Charte européenne des langues minoritaires, il lui demande comment le ministère envisage de sécuriser juridiquement, dans l’enseignement public, l’accès à une classe bilingue français-langue régionale pour les familles qui le désirent.

Texte de la réponse

Si la loi prévoit la possibilité de dispenser un enseignement de langues et cultures régionales (article L. 312-1 du code de l’éducation), ces dispositions créent une faculté et non un droit au bénéfice des parents d’élèves. Lorsque des écoles publiques d’une commune reçoivent des élèves dont la famille est domiciliée dans une autre commune, la répartition des dépenses de fonctionnement se fait par accord entre la commune d’accueil et la commune de résidence, conformément à l’article L. 212-8 du code de l’éducation.
Toutefois, la réglementation pose des limites à la scolarisation d’un enfant en dehors de sa commune de résidence, le législateur s’étant efforcé d’établir un équilibre entre, d’une part, les droits des parents et des élèves, d’autre part, la capacité d’accueil des écoles et les intérêts des communes. Ainsi, la commune de résidence ne peut être tenue de participer financièrement que si le maire a donné son accord à la scolarisation hors de la commune et dans un certain nombre de cas dérogatoires limitativement énumérés à l’article L. 212-8 précité et précisés à l’article R. 212-21 du même code. Le souhait des familles de voir leur enfant bénéficier d’un enseignement bilingue français/langue régionale dispensé dans l’école d’une commune voisine ne rentre pas dans les cas dérogatoires prévus et, en conséquence, les communes de résidence ne sont pas tenues de contribuer au financement des écoles.
Néanmoins, le maire de la commune de résidence des enfants conserve la possibilité de donner son accord à leur scolarisation dans une autre commune, la commune de résidence participant alors financièrement à cette scolarisation.
À défaut de cet accord, le maire de la commune d’accueil peut consentir à inscrire dans sa commune les enfants domiciliés dans une commune voisine, sans attendre de contrepartie financière de la commune de résidence.
Ainsi, pour les cas non expressément prévus par les textes, la possibilité de permettre l’inscription d’un enfant hors de sa commune de résidence est laissée aux maires en considération des contraintes locales dont ils doivent tenir compte.