Discours sur la rémunération des sociétés coopératives

Le jeudi 10 mars je suis intervenu en séance pour défendre la proposition de loi du groupe radical relative à la rémunération du capital des sociétés coopératives qui jouent un rôle important dans l’économie sociale et solidaire. Avec des taux directeurs européens et d’inflations très faibles, il s’agit par ce texte de répondre à une préoccupation des coopératives de voir leurs sociétaires se détourner de la participation aux coopératives pour placer leur épargne dans des produits plus attractifs. Il est à noter que le taux proposé est loin d’en faire un placement financier avantageux ou spéculatif. Il s’agit plutôt de ne pas le rendre répulsif par des taux bien inférieurs à celui de l’inflation.

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le vice-président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi de nos excellents collègues du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, portée par un non moins excellent collègue dont on sait qu’il prend aisément de l’altitude pour dominer les problèmes et voir loin (Sourires), comporte un article unique visant à modifier la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, afin de modifier les conditions de rémunération des parts sociales des coopératives.

Actuellement cette rémunération ne peut excéder le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées, publié par le ministère de l’économie et assis sur les rendements des emprunts d’État à long terme. Or, dans un contexte durable de taux d’intérêt peu élevés, et sachant que la rémunération des parts sociales est soumise aux prélèvements sociaux, puis, à hauteur de 60 % de son montant, à l’impôt sur le revenu, le taux de rémunération réel est extrêmement faible, voire proche de zéro.

Les coopératives ne pouvaient servir à leur capital qu’un intérêt dont le taux était, au plus, égal à la moyenne du taux moyen de rendement des obligations du secteur privé, bref, une rémunération particulièrement faible.

Dans le projet de loi de finances rectificative, nous avions proposé une solution qui a été censurée par le Conseil constitutionnel. Le Gouvernement a donc pris ses responsabilités. Il faut maintenant que le Parlement reprenne les siennes, en quelque sorte. Il est proposé de porter le taux maximum de rémunération à 1,81 %. Cette rémunération, dont vous conviendrez qu’elle est loin d’être mirifique, se trouve en concurrence avec celle d’autres produits comme le livret A ou le livret d’épargne populaire, dont les rendements sont relativement faibles mais qui pourraient se révéler plus intéressants.

Il s’agit donc par ce texte de répondre à une préoccupation des coopératives qui veulent éviter que leurs sociétaires ne se détournent d’elles.

Il est à noter que le taux proposé est loin de faire des parts sociales un placement financier avantageux ou spéculatif. Il s’agit plutôt de faire en sorte qu’un taux de rémunération bien inférieur à celui de l’inflation n’agisse comme un repoussoir. Pour mémoire, l’inflation en France n’a cessé de diminuer puisque, de 2,1 % en 2011, elle devrait être proche de zéro en 2015. Par ailleurs, les taux directeurs de la BCE n’ont pas, eux non plus, cessé de baisser – ils sont aujourd’hui proches de zéro, voire parfois négatifs. La rémunération servie par les coopératives étant assise sur ces taux, elle ne peut augmenter.

Il convient donc, en adoptant cette proposition de loi, d’y remédier un tant soit peu et de rendre les coopératives plus attractives.

Le texte proposé par Joël Giraud au nom du groupe RRDP s’inscrit dans l’esprit de la loi relative à l’économie sociale et solidaire défendue par Benoît Hamon et adoptée durant l’été 2014. Celle-ci visait à reconnaître la place de l’économie sociale et solidaire, qui représente environ 10 % du PIB et regroupe 10 % des salariés, en lui donnant les outils nécessaires, en particulier un cadre juridique adéquat, pour consolider son développement.

Sur le volet financement, elle prévoyait que les entreprises de l’économie sociale et solidaire puissent accéder plus facilement aux financements de la Banque publique d’investissement – BPI ; que l’agrément « entreprise solidaire » devienne un agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » afin d’élargir le secteur à des entreprises commerciales respectant les valeurs de l’économie sociale et solidaire ; que le titre associatif, instrument de financement des associations, soit modernisé tandis qu’un nouvel outil, le titre fondatif, serait créé afin de renforcer leurs fonds propres.

Le Gouvernement propose un amendement qui fait débat et dont nous parlerons tout à l’heure avec notre collègue Valérie Rabault – dont nous saurons alors si son propre amendement est soutenu par le Gouvernement –, amendement qui vise à renforcer l’encadrement commercial des parts sociales, en particulier dans le secteur bancaire. Cet amendement me semble positif et je le soutiendrai.

L’esprit de cette proposition de loi en faveur des entreprises coopératives doit être salué car le potentiel de développement de ces dernières est très important.

Tous les orateurs qui m’ont précédé, aussi bien Mmes Dubié et Le Dain que MM. Dolez, Lurton et Favennec, ont tous souligné l’importance de la coopération, en particulier dans l’agriculture. L’ancien agriculteur que je suis le sait bien et les exemples de Triskalia ou de la coopérative, plus connue, de Limagrain dans le Sud-Ouest me sont familiers.

Mais nous allons plus loin. Ont été évoqués tout à l’heure les motards qui ne trouvaient pas à s’assurer. Sachez, chère Anne-Yvonne Le Dain, que les assurances mutuelles agricoles ont été créés par les agriculteurs au sortir de la guerre pour la simple raison qu’ils avaient besoin d’une assurance pour leur cheval – on n’en était pas encore au tracteur. Personne ne voulant assurer les chevaux, ils ont créé leur propre assurance, en particulier dans la région bretonne bien connue du Léon.

Notre tissu industriel et surtout notre tissu agricole ne seraient pas ce qu’ils sont sans les coopératives, dont a été rappelée l’excellence sur le plan social. Les coopératives offrent en effet la possibilité d’être salarié tout en étant son propre employeur par le biais de la détention de parts sociales. C’est une vieille idée, peut-être même un mythe. Je pense à la célèbre maxime de Proudhon : « La propriété, c’est le vol ! ». Sauf peut-être si l’on est propriétaire de son outil de travail, aurais-je envie de dire !

Je voterai naturellement avec enthousiasme cette proposition de loi, monsieur le rapporteur. Vous pouvez compter sur notre appui et sur le mien en particulier.

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