Vincent Denis, l’ingénieur à l’étoile chanceuse
Vincent Denis, ingénieur aéronautique et spatial, est récemment sorti de sa discrétion naturelle pour mettre son entreprise, Sadal Engineering, en lumière. Son projet « DrAGON » – développement de drones autonome sans pilote pour la surveillance ou le transport – s’est vu attribuer trois prêts d’honneur, l’un à l’échelle locale par Initiatives Pays de Ploërmel, un autre à l’échelle régionale par Réseau breton de l’innovation (RBI) et un dernier à l’échelle nationale par Initiatives Entreprises Remarquables. Outre le caractère innovant et inédit du procédé, ce qui séduit chez Vincent Denis est sa passion, son ambition de création d’emplois et son ancrage local, à Guer, où il s’investit comme entrepreneur.
Vincent Denis a toujours regardé vers le ciel, guidé par ses rêves et les concrétisant : retour sur une passion qui n’est pas prête de s’essouffler.
Une enfance la tête dans les étoiles
Après « maman » et « papa », le premier mot que Vincent Denis a prononcé a été « azo ». Ce son désignait pour le bambin nez au vent tout ce qui volait, avion comme oiseau. À 7 ans, il se fait offrir un beau livre sur l’astronomie. « Je rallumais la lumière, la nuit, pour le lire en cachette », se souvient-il. Il se rappelle aussi avoir déclaré, dans la grande pièce de vie familiale, au même âge : « Je veux construire une fusée ! ». Les années qui suivent s’orientent autour de cette volonté affirmée haut et fort. Les jeux de cours de récréation avec son camarade se transforment en séances de travail avec plans, dessins et simulation de voyages en navette spatiale. Au collège, il s’initie à l’astronomie et se consacre, la nuit, à la contemplation des étoiles. Comme certains adolescents découpent les articles sur leurs stars préférées, Vincent compile ses documents scientifiques dans un cahier. « Les cratères lunaires, les galaxies… Tout cela me faisait rêver. »
Un stage à la NASA
Au lycée, il choisit logiquement un bac S. Vincent suit une scolarité sans histoire, en veillant à ne pas se démarquer. Hélas, sa discrétion joue contre lui et il est catégorisé comme fainéant par son professeur de maths. Les portes des classes préparatoires, et donc la voie royale vers son rêve d’aéronautisme, lui sont fermées. Qu’à cela ne tienne, il emprunte un autre chemin. Ses études lui font toucher du doigt ses rêves : son stage d’IUT d’électrotechnique (Rennes) le conduit chez Thales Astrium, en immersion dans le cerveau d’Ariane 5 et au cœur des satellites ; son cursus en Angleterre lui apprend les bases de l’aéronautique. « Je construisais des avions, j’avais pris confiance. Alors je me suis dit : après les avions, les fusées ! » Et le voilà embarqué dans une nouvelle session d’études, à Strasbourg, dans un MSc of space program. « C’était le rêve et une expérience incroyable. J’ai notamment rencontré Jean-Loup Chrétien et fait trois mois de stage à la NASA en propulsion. J’avais accompli mon rêve d’enfant. »
La technique oui, mais au service de l’homme
Son but atteint, Vincent se rend compte qu’il avait mené à terme son plan de formation sans jamais penser à un plan de carrière. À 23 ans, il postule au hasard chez Altran, société qui loue des ingénieurs aux entreprises. « Envoyé chez EADS Launc Vehicle, ça y est, j’entre enfin dans le saint des saints : l’entreprise même où l’on fabrique la fusée Ariane 5 », mais, dans une ambiance dépassionnée, il perd son entrain. Ayant obtenu une habilitation Confidentiel Défense, c’est dans ses missions pour l’Armée qu’il retrouve un environnement où le défi humain est présent. Il s’implique dans des projets de plus en plus complexes. Ce qui le stimule, c’est la place de l’homme dans les problématiques auxquelles il doit répondre : « L’humain était au cœur de tout. »
Quand Altran réoriente son activité, Vincent se décide à se lancer seul, comme consultant en innovation, et continue son travail pour la Défense. « Je m’étais fait une réputation et les gens me faisaient confiance. On a commencé par me donner des missions sur quelques semaines, puis sur quelques mois et maintenant, nous sommes sur des missions couvrant plusieurs années. C’est quand on m’a passé une commande à plus d’un million d’euros que je me suis posé la question de faire évoluer la société. Continuer seul ou embaucher ? J’avais 35 ans, c’était le moment ou jamais de prendre des risques. J’ai décidé de me donner les moyens de mes ambitions. »
DrAGON : un projet qui donne des ailes à la jeune entreprise
C’est ainsi que Vincent Denis crée Sadal Engineering, qu’il envisage comme « un laboratoire de recherche, un endroit où les idées germent pour améliorer les moyens techniques mis au service des gens, en relation étroite avec les universités locales. » Les étoiles ne sont jamais loin : dans le nom de son entreprise, dont la traduction en arabe est « étoile chanceuse » et parce que sa bonne étoile veille en effet sur lui. Il connait deux ingénieurs avec qui il souhaite collaborer et qui ne demandent qu’à rejoindre l’aventure. Ensemble, ils œuvrent pour un client unique, position peu confortable pour la pérennité d’une entreprise. Cependant, parce que le sujet est tellement sensible qu’il interdit toute commercialisation de savoir-faire, Vincent Denis doit imaginer un essor différent. Il passera par la création d’un nouveau produit.
« Une belle aventure humaine »
L’heureuse destinée met alors sur sa route un ancien ami, ingénieur électronicien en aéronautique. L’occasion d’un retour aux sources et aux premières amours est trop belle : ils travailleront sur les aéronefs, et plus précisément les drones. Le projet « DrAGON » balbutie. Ils analysent le marché, la demande et décèlent un besoin. Les drones sont en pleine expansion, mais les entreprises sont freinées par les problèmes que pose la formation des pilotes. Les avions ont bien des systèmes d’atterrissage automatique : pourquoi pas les drones ? Le défi est lancé et relevé par Vincent Denis et son équipe, qui devrait s’étoffer dans les mois à venir. Deux ingénieurs ont été recrutés en 2017 et 2018 sera marquée par l’embauche d’un ingénieur informaticien, d’un ingénieur mécatronicien et d’un technicien pour les travaux de réalisation. 2019 verra arriver un ingénieur productique et deux nouveaux techniciens. Enfin, l’arrivée d’un commercial est prévue pour 2020.
Plus encore qu’une aventure d’entreprise, Sadal Engineering est une belle aventure humaine, implantée sur son territoire et soucieuse de participer à son rayonnement.