Article du Peuple Breton: La cohésion nationale repose-t-elle sur les épaules du petit Fañch?
Ce lundi 8 octobre s’est tenue à la cour d’Appel de Rennes la suite de l’affaire dite « Fañch ». En présence du jeune enfant, de ses parents, de l’avocat Me Jean-René Kerloc’h ainsi que de plusieurs dizaines de personnes venues soutenir la famille, un grand nombre obligeant une grande partie d’entre eux à rester dans le couloir et d’essayer au mieux d’entendre les délibérations.
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L’audience avait lieu à 14h30 lundi. L’avocat de la famille a développé sa plaidoirie en exprimant l’absurdité du refus de l’inscription du prénom à l’état civil de la part de l’administration. De nombreux arguments ont pu être avancés : dans les faits, la loi autorise en effet ce prénom et ce n’est qu’une circulaire de 2014 qui viendrait interdire les signes ne faisant pas partie d’un alphabet latin. En rappelant les faits discriminatoires, l’avocat a aussi souligné la hiérarchie des normes, dont celle qui induit la supériorité de la loi sur une circulaire.
L’une des accusations faite voudrait que la seule langue officielle de la République étant le français, les mots de langues dites « régionales » ne sauraient être acceptés. À cela, l’avocat a rétorqué que les noms propres sont invariables. L’acte de naissance ayant été rédigé en français, le nom Fañch ne posait donc aucun problème à enregistrer. Par ailleurs, dans des dictionnaires où la haute instance qu’est l’Académie Française veille, on peut voir des mots d’origine étrangère, appartenant à la langue française donc, possédant le signe « ñ ». L’exemple même de haut-responsables de l’État comme la consule de France à Johannesburg Madame Sonia Doña Pérez porte ce tilde montre l’incohérence de l’accusation.
Un des points sur lequel l’avocat de la famille est revenu assez longuement concerne les propos qu’ont pu soulever des responsables à propos de cette affaire : le simple nom de Fañch, avec le tilde, menacerait « l’unité nationale ». « Sur les petites épaules de Fañch [repose] tout le poids de la cohésion nationale et de l’unité de ce pays ». Ces propos ironiques ont fait rire l’assistance. Ils montrent là encore le ridicule d’une soi-disante menace séditieuse brandie par quelques personnes dans l’opinion publique.
Enfin, au-delà du problème administratif, l’avocat a pu expliquer que cette situation avait été ressentie comme une humiliation voire une provocation avant de conclure que c’est ce type d’injustices qui transforment des personnes qui ne l’étaient pas en militants. De ce type d’injustices peut surgir une frustration collective de la part des concitoyens. L’avocat du procureur général ayant de son côté affirmé qu’il n’y avait en rien « une volonté jacobine » de la part de l’administration et que de nombreuses personnes se nommaient Fanch (sans le tilde) et que cela ne dérangeait pas plus que cela dans la prononciation. Son intervention ayant été bien plus brève, on se plaît à y voir un bon présage pour la suite de cette affaire…
La séance levée, la cour a redonné rendez-vous à la famille le 19 novembre prochain pour le verdict. D’ici là, la famille reste confiante et déterminée pour la suite.