Culture bretonne. « Kenavo Yann-Fañch »
C’est avec beaucoup de tristesse que j’appris que Yann-Fañch Kemener nous avait quitté. Une voix de la Bretagne et un morceau de la culture disparaît avec lui. Kenavo Yann Fañch.
Hor mignon Yann-Fañch Kemener a zo aet d’an anaon. Un arzour, ur vouezh, un tamm eus sevenadur Breizh a zo aet. Glac’har a zo em c’halon. Kenavo, Yann-Fañch.
Yann-Fañch Kemener , figure du chant traditionnel breton et défenseur de la langue bretonne, est décédé samedi à l’âge de 61 ans emporté par un cancer contre lequel il luttait depuis un an et demi. Il a consacré toute sa vie d’artiste au chant populaire breton. C’est une grande perte pour le monde culturel breton tant il a œuvré pour la langue bretonne et sa représentation en dehors de la Bretagne. Il laisse derrière lui une carrière exceptionnelle.
Sur scène dès l’âge de 15 ans
Yann-Fañch est né en 1957 à Sainte-Tréphine dans les Côtes-d’Armor. Élevé en breton et en musique, il est très tôt influencé par ses arrières grands-mères, des chanteuses de kan-ha-diskan, et un grand oncle. Sa mère aussi chante et danse, et dès son plus jeune âge, il entend parler des chanteurs exceptionnels. Baigné dans la musicalité, il commence à se produire sur scène dès l’âge de 15 ans.
Dans les années 1970, il se lance dans la collecte de chants et de contes auprès des plus anciens, détenteurs d’une culture menacée de disparition, d’oubli. C’est en ce sens que ce travail de collectage et sa contribution à la transmission du chant breton a été exceptionnelle.
« A travers le monde »
Il parcourt villes et campagnes de Bretagne, pour y chanter tantôt en fest-noz tantôt dans une chapelle. Puis, en 1977, il enregistre son premier vinyle de gwerzioù en 1977, « Chants profonds de Bretagne ». C’est encore l’époque du folk, des musiques festives et militantes. Yann-Fañch interprète a capella des chants longs, aux mélodies dépouillées et envoutantes.
Le groupe Barzaz est révélé au public breton en 1989, avec Jean-Michel Veillon, Gilles Le Bigot, Alain Genty et David Hopi Hopkins. En 1993, grâce à Dan ar Braz et L’Héritage des Celtes, il fait la connaissance de Didier Squiban : ils formeront un duo au succès phénoménal. Puis Yann-Fañch rencontrera le violoncelliste Aldo Ripoche, le début d’un compagnonnage de près de vingt ans.
Avec plus d’une trentaine de disques et des centaines de concerts, il fera connaître la gwerz et le kan-ha-diskan à travers le monde. En 2005, il a même reçu le prix de l’Académie Charles Cros dans la catégorie Musiques du monde pour « An Dorn ».
« Mettre la matière à disposition »
En novembre dernier, il avait diffusé un message sur son site internet expliquant mettre en suspens toutes ses activités « pour des raisons de santé ».
Il se confiait récemment dans un documentaire, sur cette vie d’apprentissage et de partage, de la force du chant à danser. « Les gens passent mais le patrimoine nous survivra. C’est ce que je veux, mettre cette matière à disposition. Aux gens de réfléchir ensuite à ce qu’ils veulent en faire. »