Julie Desbois, future maroquinière. Le prestige de l’artisanat
Passionnée de mode et désireuse de trouver un métier valorisant le travail manuel, Julie Desbois a décidé de s’engager pour un parcours de 5 à 7 ans et de devenir Compagnon du Devoir. Qui dit études longues ne dit pas nécessairement cours magistraux, fréquentation assidue de bibliothèques universitaires et innombrables heures passées statique devant un écran d’ordinateur. À travers le témoignage sur son déjà très beau parcours, Julie nous fait découvrir une autre voie de l’excellence : celle de l’artisanat.
Faire des études, oui, mais avec du savoir-faire manuel !
Originaire de Camoël, Julie Desbois, bientôt 20 ans, baigne dans l’univers des Compagnons et de l’artisanat depuis toute petite. Son père est Compagnon du Devoir en menuiserie, et son grand frère a pris la même direction. Julie, elle, aimait la mode, s’intéressait à toutes les voies professionnelles, mais surtout, était curieuse. Collégienne, elle a participé aux ateliers de L’outil en main à Férel. Cette association propose aux jeunes de découvrir, tout au long de l’année scolaire, de nombreux métiers manuels et de les mettre en pratique à travers des réalisations concrètes. À cette époque, c’est la couture qui plait à Julie. « Ces ateliers sont super intéressants, car ils permettent, quand on est jeune et que l’on ne sait pas quoi faire plus tard, de découvrir plusieurs métiers. L’initiation aux métiers de la couture est d’ailleurs ce qui m’a permis de me décider à m’orienter vers un bac pro Métiers de la mode et du vêtement », témoigne-t-elle. Son bac en poche, elle a considéré les possibilités de prolonger ses études, mais là, rien ne la convainc. « J’aurais pu faire un BTS, mais cela me dirigeait vers l’industrie, et je n’avais pas envie de ça. Je voulais travailler de mes mains, pas passer mes journées sur un ordinateur ou être en usine. J’ai cherché des alternatives. La rencontre avec une maroquinière, lors d’un repas organisé par les Compagnons, a été une révélation. J’ai su que c’était la voie que je voulais suivre. C’est donc sans doute un hasard qui m’a fait suivre cette voie… quoi que… peut-être pas… Il faut dire que j’adore les sacs à main ! »
Persévérer et croire en ses rêves
Ses souhaits professionnels clairement identifiés, Julie s’est donné les moyens de les concrétiser. Son bac obtenu, il lui fallait, pour commencer l’aventure du compagnonnage, trouver une entreprise qui l’accueillerait pendant deux années, la formerait, lui permettrait de développer ses compétences tout en continuant à suivre des cours. Julie a tout tenté. « Pour trouver ma première entreprise d’apprentissage, j’ai dû appeler une bonne centaine d’entreprises dans toute la France ! Trouver cette première embauche a été le plus compliqué jusqu’à présent, car beaucoup d’entreprises ne prennent pas d’apprentis. » Elle a trouvé son bonheur à Millau, chez Causse Gantier, une ganterie haut de gamme, grâce à une pointe de hasard et à une audace bienvenue. « J’ai appelé par erreur une mégisserie [tannerie spécialisée principalement en agneau, mouton et chèvre], qui m’a bien sûr indiqué qu’elle n’était pas ce que je cherchais. J’y suis allée au culot : j’ai demandé s’ils ne connaissaient pas une entreprise de maroquinerie qui prendrait des apprentis. C’est alors qu’ils m’ont donné les coordonnées de Causse Gantier, avec lesquels ils travaillaient. Je les ai contactés : c’étaient les bons ! » Elle a ainsi passé deux années dans cette entreprise, alternant l’apprentissage du métier dans les ateliers et des sessions de deux semaines de cours théoriques au CFA toutes les six semaines. C’est dans le cadre de sa formation qu’elle a préparé le concours du Meilleur Apprenti de France en maroquinerie, pour lequel elle a remporté un premier prix. « J’ai travaillé pendant trois mois sur ce projet, tous les soirs, en rentrant chez moi. Le sujet était précis : un porte-document pour un montant d’environ 450 €. Le cahier des charges l’était tout autant : schémas explicatifs, choix restreint des matières et des coloris. Il s’agit bien plus d’une épreuve technique que d’une épreuve créative. Ce qui est évalué, c’est notre niveau en termes de capacité de fabrication d’un produit. » Son premier prix fait la fierté de sa famille et de l’entreprise aveyronnaise qui lui a donné sa chance.
Un tour de France et une aventure humaine formidable
Julie a pris la route, en ce début septembre, pour une aventure humaine et professionnelle à nulle autre pareille. Elle est en ce moment à Le Blanc, à côté de Poitiers, pour un an. La suite de son parcours, elle ne la connaît pas. « C’est selon la place qui se libérera. Je serai envoyée pour un an dans une autre entreprise prenant des Compagnons du Devoir. » Les compagnons ont des partenariats avec des entreprises artisanales dans toute la France, et des maisons de Compagnons pour un hébergement collectif. « C’est une expérience très intense, car on rencontre beaucoup de personnes différentes, dans tous les corps de métiers. C’est une sorte de grande colocation : on se retrouve le soir pour manger ensemble et on discute tous de nos métiers, de comment s’est passée notre journée. Quand on fait les Compagnons, on n’apprend pas qu’un métier, on en découvre plusieurs ! Il y a des métiers que je connaissais de nom, sans savoir tout le savoir-faire qu’il y avait derrière. »
Objectif : la création d’une entreprise de maroquinerie
À la fin de ses 5 à 7 années de tour de France, Julie réalisera un chef-d’œuvre. Cette pièce, composée selon son inspiration ou en réponse à une commande d’une maison de Compagnons, sera son épreuve finale. Elle aura aussi la tâche de transmettre des savoir-faire aux plus jeunes. Ensuite, elle aura toutes les armes en main pour atteindre ses objectifs professionnels, à savoir la création de son entreprise de maroquinerie. « C’est l’objectif que je me fixe et je ferai tout pour l’atteindre. Mon idéal serait de fabriquer des pièces uniques, sur-mesure, à la demande du client : des sacs à main, portefeuilles, sacs de voyage… »
Ce que retient Julie de sa belle expérience et de ses premiers pas dans l’univers professionnel, c’est que la clé de tout est d’oser et de persévérer. « On n’est pas gagnant à tous les coups, mais comme on dit, qui ne tente rien n’a rien ! »