Distorsions de concurrence de nos industries agroalimentaires
QUESTIONS AU GOUVERNEMENT – Question n° 3506 adressée au ministre délégué auprès du ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, chargé de l’agroalimentaire
Question publiée au JO le : 04/09/2012
Réponse publiée au JO le : 29/01/2013
Texte de la question
M. Paul Molac attire l’attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, chargé de l’agroalimentaire, sur les distorsions de concurrence qui touchent nos industries agroalimentaires. Nos entreprises subissent directement une concurrence déloyale de la part d’entreprises agroalimentaires allemandes qui utilisent de la main d’œuvre d’origine d’Europe centrale et orientale payée entre 3 et 5 euros de l’heure alors que la moyenne en France se situe entre 9 et 10 euros de l’heure. Selon certaines sources, quatre-vingt-dix pour cent de la main d’œuvre de certains abattoirs et ateliers de découpe allemands serait composée de main d’œuvre temporaire d’Europe centrale et orientale qui ne bénéficierait d’aucune convention collective, toucherait des salaires particulièrement bas et dont les conditions de vie seraient dignes du XIXe siècle et de Germinal. Les industries agroalimentaires emploient souvent beaucoup de main d’œuvre. Le coût du travail a des conséquences importantes sur leur compétitivité et leur rentabilité. Nous ne pouvons accepter que nos concitoyens, nos entreprises et nos territoires soient menacés par ces types de pratiques qui s’apparentent à du dumping social. L’agroalimentaire est l’un des moteurs économiques de nombreuses régions. Les difficultés de l’entreprise Doux nous rappellent cruellement que nos industries agroalimentaires sont fragiles et qu’elles ont besoin d’être restructurées. Il lui demande donc quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre pour mettre un terme à cette concurrence déloyale au niveau européen et ainsi rétablir la confiance de nos concitoyens dans l’Union européenne.
Texte de la réponse
En termes de coût du travail, il faut rappeler qu’il n’existe pas de salaire minimum général en Allemagne sauf si des accords ont été fixés au niveau d’une branche. Aucun accord n’existe dans le secteur des abattoirs : ainsi n’existe-t-il aucun butoir à la baisse pour les salaires dans ce secteur. Dans le traité d’adhésion des nouveaux États membres (NEM), l’Allemagne a négocié une dérogation valable jusqu’à mai 2011 permettant de limiter l’entrée de travailleurs en provenance des NEM. Le recours à ces travailleurs a été subordonné à une procédure d’autorisation délivrée par l’agence fédérale du travail, afin de s’assurer qu’il n’existe pas de main d’oeuvre allemande permettant de satisfaire les besoins. Dans le secteur des abattoirs, l’agence fédérale délivrait facilement des autorisations dans la mesure où la pénurie de main d’œuvre allemande est avérée.
Ces restrictions ont été levées en mai 2011 pour tous les NEM sans que cela n’ait entraîné d’afflux particulier de main d’oeuvre. Toutefois des mesuures particulières avaient déjà été prises. Par exemple, pour éviter un effet négatif sur les salaires, lié à la fin des restrictions à l’entrée des travailleurs des NEM depuis le 1er mai 2011, le Gouvernement allemand a mis en place des salaires bruts minimum dans l’intérim d’un montant de 7.6 € à l’ouest et 6.65 € à l’est, qui seront progressivement portés à 8.19 € à l’ouest et 7.5 € à l’est en 2013. Dans le secteur agroalimentaire, ces dispositions devraient concerner en particulier les industries des viandes et notamment les abattoirs, qui recourent largement aux salariés intérimaires. Il faut noter qu’en l’absence d’accord de branche sur un salaire minimum, les intérimaires bénéficieront d’un avantage sur les salariés bénéficiant d’un contrat de durée intérminéeI. Il faut souligner que les salariés des NEM aujourd’hui cantonnés à quelques secteurs vont avoir accès à des métiers moins difficiles : il est donc possible que les secteurs qui ont le plus recours à ce type de travailleurs, et en particulier celui des industries des viandes et les abattoirs, devront réviser les salaires à la hausse pour les garder, limitant ainsi les écarts de salaires entre la France et l’Allemagne dans ce secteur. Les professionnels allemands des abattoirs investissent dans l’automatisation de leurs outils pour préserver leur compétitivité.
La problématique plus large de la compétitivité de nos secteurs agricole et agroalimentaire est traitée dans le cadre des travaux qui font suite à la conférence sociale de juillet 2012, notamment la réflexion engagée sur la réforme du financement de notre système de protection sociale et dans le cadre du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi présenté le 6 novembre par le Premier ministre avec la mise en œuvre, dès 2013 du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.