Effectifs et coordination des services de renseignement du ministère de la Défense
M. Paul Molac. Monsieur le ministre de la Défense, face à la menace majeure que constitue aujourd’hui le terrorisme international, djihadiste en particulier, il est essentiel de pouvoir identifier les interactions entre les différents groupes terroristes au Sahel et au Moyen-Orient, et les éventuels projets d’attentats sur le territoire national qui présenteraient des liens avec ces deux zones géographiques. Notre protection au plus près passe par la détection au plus loin du risque terroriste – on ne peut en effet prétendre tout connaître à partir de Paris.
Cela doit notamment se concrétiser par un recueil de l’information auprès des groupes locaux combattant les terroristes djihadistes. Au Sahel, je pense au travail qui s’est effectué avec certains mouvements touaregs, qui a permis de sécuriser un processus de stabilisation dans le Nord-Mali. Au Moyen-Orient, nous pouvons faire référence au mouvement kurde. Ces organisations locales ont une connaissance fine des territoires, des équilibres et des ennemis qui leur sont opposés. La libération de Kobané en Syrie n’a pu se faire que par un travail de coordination tactique entre les troupes kurdes au sol et les aviations de la coalition, essentiellement les aviations américaine et française. En effet, à partir du moment où la coalition a pris ses renseignements au sol directement auprès des Kurdes, les bombardements ont atteint leur cible.
La lutte contre les combattants djihadistes à l’étranger et la détection de l’exportation de cette menace terroriste sur le sol national requièrent un même travail de renseignement de haute qualité. Pour le mener, monsieur le ministre de la défense, nous disposons de trois services de renseignement : la direction générale de la sécurité extérieure, la direction de la protection de la sécurité et de la défense et la direction du renseignement militaire. Pouvez-vous nous préciser le rôle de chacun de ces services ? Par ailleurs, pourriez-vous nous expliquer la coordination entre ces services, notamment dans les phases de recueil et de traitement ? Chacun sait bien que les règles doivent être celles d’une étroite coopération interservices et d’une totale transparence dans l’échange de renseignements afin d’assurer une efficacité maximale de notre lutte antiterroriste.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. J’ai indiqué tout à l’heure, monsieur le député, que le ministère de la défense avait la responsabilité à la fois du renseignement extérieur, confié à la DGSE, du renseignement d’intérêt militaire, confié à la DRM, et du renseignement de protection des installations et ressources humaines de la défense, assuré par la DPSD – j’y ai également fait référence tout à l’heure en répondant à M. Moignard.
Je voudrais vous repréciser les choses.
La DGSE, ce sont 6 000 agents. Elle est plus particulièrement chargée du renseignement d’ordre géopolitique, du volet extérieur du contre-espionnage, du renseignement de crise, du contre-terrorisme, de la contre-prolifération et de la criminalité internationale. Elle opère essentiellement à l’extérieur de nos frontières et est spécialisée dans le recours aux méthodes clandestines de renseignement. Vous me permettrez donc de ne pas réagir sur la première partie de votre question.
La DRM regroupe, quant à elle, un peu moins de 1 600 personnes. Elle fournit du renseignement d’ordre militaire aux autorités politiques et au commandement militaire afin de les guider dans leurs choix d’intervention et leurs décisions. Son champ d’investigation est le renseignement nécessaire aux forces en opération. Elle est par exemple très engagée au Sahel, contre Boko Haram, ou au Levant. Elle veille aussi activement sur les potentiels des pays susceptibles de faire usage de leur puissance militaire contre nos intérêts.
Elle bénéficie aussi d’un très gros effort dans le cadre de la LPM, en particulier grâce aux programmes de satellites MUSIS et CERES, dont j’ai déjà eu l’occasion de parler. Des drones d’observation ont également été acquis, ainsi que des pod de reconnaissance. Elle dispose donc d’outils très techniques.
Enfin, la DPSD – dont j’ai parlé tout à l’heure – remplit des missions de protection et de contre-ingérence au profit du ministère de la défense.
Je suis très attaché au fait que ces services mettent en commun leurs informations pour des opérations particulières ; cela permet de rendre leur action aussi efficace que possible. Cette mutualisation améliore leurs performances. C’est notamment le cas dans l’opération Chammal, pour laquelle une cellule de fusion d’informations permanente a été mise en place ; c’est aussi le cas pour le Sahel. Cette fusion d’informations donne de très bons résultats.
La coordination générale de l’ensemble des services est effectuée par le coordonnateur national du renseignement, placé auprès du Président de la République, qui coordonne l’ensemble de la communauté du renseignement – laquelle comprend des services relevant du ministère de la défense, du ministère de l’intérieur, et du ministère des finances.
J’espère avoir répondu à votre question sur l’ensemble de ces services. Au passage, je m’aperçois que j’ai omis de citer les effectifs de la DRM et de la DPSD, comme je l’ai fait pour la DGSE. La DRM compte environ 1 600 personnes, et la DPSD un peu moins de 1 200 personnes.