Seule une gouvernance partagée nous permettra de sortir de cette crise
Le Premier Ministre Edouard Philippe est venu présenter mardi le plan de déconfinement devant la représentation nationale. Un vote a eu lieu mais les députés n’ont pas eu la possibilité de discuter des éléments du plan et de proposer des améliorations. Le vote était donc purement indicatif.
Cette crise sanitaire qui nous frappe, à laquelle s’ajoute une crise économique et sociale, est sévère. Dès lors, afin de la surmonter et de préparer l’avenir à court et moyen terme dans de bonnes conditions, il est indispensable de mobiliser et faire confiance à tout un ensemble d’acteurs du pays : élus locaux, scientifiques, parlementaires, représentants professionnels et syndicaux, en somme l’ensemble des corps intermédiaires…
Or, à quoi assiste-t-on ? Le Président de la République fixe la date du 11 mai de manière arbitraire et martiale selon son intime conviction, et le Gouvernement est par la suite contraint de définir une stratégie. On assiste dès lors à des approximations : confrontées aux réalités du terrain qui demandent de la souplesse, les prises de position d’un jour ne sont plus celles du lendemain, si bien que plus personne ne s’y retrouve.
La question des masques symbolise l’ensemble des difficultés auxquelles le Gouvernement ne parvient pas à faire face. Dans un premier temps, il nous a été indiqué que ceux-ci étaient inutiles, quand ils vont désormais être quasiment obligatoires, sans aucune certitude dans notre capacité à pouvoir nous en fournir en nombre suffisant. A ce titre, les mesures mises en œuvre par les régions, malgré leur faible degré de compétences en la matière et les moyens limités qui sont les leurs, concernant l’approvisionnement en masques n’ont rien à envier à celles de l’État. On peut même noter que les commandes de masques des collectivités locales se sont faites avant celles de l’État qui s’est révélé peu réactif lors des premiers jours de la crise sanitaire. Je déplore également que nous ne serons pas en mesure de réaliser des tests en quantité suffisante ce qui compromet la stratégie de déconfinement. Dans ce cas, pourquoi rouvrir les écoles progressivement à partir du 11 mai alors que le conseil scientifique recommande leur fermeture jusque septembre et que les gestes barrières sont impossibles en maternelle ?
Malheureusement, cet épisode n’a fait qu’approfondir le déficit de confiance de l’opinion à l’égard des dirigeants, face notamment à un déficit de transparence et des mesures qu’il nous est difficile de comprendre. Je doute du plan de déconfinement du Gouvernement et de la méthode qu’il utilise. Je ne l’ai donc pas voté car il s’agirait de donner un blanc-seing sur des mesures pour lesquelles de nombreux flous demeurent et pour lesquelles les propositions des parlementaires et élus locaux ne sont pas suffisamment prises en comptes. La gestion différenciée selon la progression de l’épidémie dans les départements est un début de réponse positif, mais pour lequel peu de réponses pratiques ont été apportées en dehors des possibilités différentes d’ouverture des parcs et des classes entre départements classés vert ou rouge. Surtout, si nous avons confiné les personnes chez eux durant deux mois, c’était pour nous donner le temps de nous préparer à affronter la situation en période de non-confinement. Or, force est de constater que nous ne sommes pas beaucoup plus préparés maintenant qu’avant la crise étant donné les manques en termes de protections, de tests, de traitements et de vaccin.
Pour parer à cette situation de crise, il est donc temps de responsabiliser davantage les acteurs de terrain qui sont au plus près des difficultés et mieux à même d’y répondre. Il est illusoire de penser que quelques individus puissent seuls imaginer la mise en œuvre d’une stratégie de sortie de crise pour plus de 67 millions d’individus. Pourtant, les Français ne demandent qu’à participer et ils peuvent être très réactifs à l’image des couturières, et beaucoup d’autres « petites mains » dont nous n’avons jamais eu autant besoin pour pallier les déficiences de l’Etat.