Dégradation de la situation de la biologie médicale française

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT – Question écrite n° 24980 à Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la dégradation progressive de la situation de la biologie médicale française. 

Question publiée au JO le : 03/12/2019 

M. Paul Molac attire l’attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la dégradation progressive de la situation de la biologie médicale française. En effet, depuis quelques temps déjà, les syndicats de biologistes libéraux comme hospitaliers alertent sur leurs conditions d’exercice et leurs conséquences sur la santé et l’intérêt des patients. Tous identifient différentes causes à cette dégénérescence croissante : lourdeur de l’accréditation des examens, rachat de laboratoires par des groupes financiers et baisse des tarifs. Effectivement, tous s’alarment de la lourdeur administrative de l’accréditation obligatoire depuis 2013 et qui vise la totalité des analyses d’ici à novembre 2020. Alors que sur le plan humain, cette démarche engendre une charge de travail excessive et chronophage, sur le plan financier, le coût moyen de l’accréditation par laboratoire a été estimé à 445 000 euros dans la phase initiale puis à 145 000 euros par an. Cette charge est jugée comme la plus contraignante d’Europe et donc totalement déconnectée de la santé et de l’intérêt du patient. A cela, s’ajoute la financiarisation du secteur. L’ouverture du capital à des investisseurs financiers, sans lien avec la santé (fonds de pension canadiens, américains…), en plus de menacer l’indépendance professionnelle, a également contribué à une industrialisation de la biologie médicale et à une centralisation des laboratoires. Concrètement, on retrouve d’un côté des plateaux techniques pour la réalisation des analyses, et de l’autre des laboratoires dits périphériques pour la réalisation des prélèvements. Avec une telle organisation, le délai de rendu des résultats s’est allongé, alors que l’on sait aujourd’hui que la biologie médicale permet 70 % des diagnostics médicaux et la communication de résultats pathologiques en urgence. En outre, la financiarisation du milieu conduit également à une fuite, vers des fonds d’investissements souvent étrangers, de l’argent de la sécurité sociale, issu des cotisations sociales ; un paradoxe quand on connait les efforts demandés pour pallier au déficit de la sécurité sociale. A tous ces bouleversements, il faut ajouter les baisses régulières de la nomenclature des actes de biologie médicale ; le dernier objectif en date étant une économie de 170 millions d’euros en 2020. Cette nouvelle coupe budgétaire est ressentie comme une injustice pour les biologistes libéraux. Ces derniers revendiquent en effet une implication forte dans l’innovation biotechnologique mais surtout dans les efforts de réduction des dépenses de santé, en faisant économiser à l’assurance maladie plus d’un milliard en dix ans. Alors que pour répondre aux besoins de la population et à son vieillissement le nombre de prescriptions augmente chaque année de près de 4 %, l’enveloppe qui est consacrée aux biologistes libéraux baisse, quant à elle, depuis dix ans. Le risque est qu’à terme des laboratoires ferment, notamment en milieu rural. Cela aurait pour conséquence de retarder encore les délais d’obtention des résultats, et d’inciter les usagers à aller vers l’hôpital, et plus particulièrement vers les services d’urgences, pour avoir une réponse rapide en cas de doute sur leur santé, alors même que ceux-ci sont déjà engorgés. C’est pourquoi, au vu des récentes et dangereuses évolutions décrites, il demande au Gouvernement quels moyens il compte mettre en œuvre afin de préserver l’efficience de la biologie médicale dans le système de santé puisque, malgré les différentes alertes des professionnels concernés, des erreurs majeures, tant sur le plan économique que sur le plan de la santé publique, continuent d’être produites.

Réponse publiée au JO le : 10/12/2019

Pour l’avenir de la biologie médicale française, il importe de concilier deux impératifs : la contrainte pesant sur les finances publiques et le maintien d’un haut niveau de performance du secteur en matière d’innovation et de service rendu au patient. Les protocoles d’accord pluriannuels signés depuis 2014 ont permis de répondre à ce double objectif. Un premier protocole couvrant la période 2014-2016 a ainsi fixé un taux de croissance de 0,25% par an pour les dépenses de biologie en ville. Face au constat positif partagé par les partenaires, de stabilisation et de prévisibilité des dépenses, l’assurance maladie et les syndicats signataires ont souhaité prolonger ce protocole d’accord pour la période 2017-2019. Des négociations sont en cours entre l’assurance maladie et les partenaires syndicaux pour signer un nouveau protocole d’accord pour les années 2020-2022 sur des bases similaires, étant entendu que le Gouvernement est attaché à la préservation d’un modèle et d’un service de proximité et adapté à chaque territoire. A cet effet et dans le cadre du pacte de refondation des urgences, la ministre des solidarités et de la santé a pris, le 9 septembre 2019, des engagements sur le développement de la biologie délocalisée pour répondre aux enjeux d’innovation et de proximité du secteur. Les nouvelles technologies en nanomatériaux améliorent la sensibilité des tests et permettent une miniaturisation des plates-formes de diagnostic. Dans ce cadre, un desserrement des conditions de mise en œuvre de la biologie délocalisée, limitée à la pratique des examens simples et automatisés et placée sous la supervision des biologistes est pertinente. Il permettra d’apporter une réponse complémentaire aux enjeux de proximité et de réponse aux besoins urgents.

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