Projet de délimitation des régions : explication de mon vote contre
Le mardi 9 décembre, j’ai une nouvelle fois réalisé, au nom de mon groupe parlementaire, l’explication de vote sur le Projet de loi de délimitation des Régions en nouvelle lecture qui m’a amené à voter contre celui-ci, tant pour des raisons de méthode que de contenu.
Compte-rendu de mon intervention
Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, avec ce projet de loi nous sommes allés de déceptions en désillusions. Ce fut une nouvelle lecture pour rien, car rien, quasiment, n’a été modifié.
Pourtant, le Sénat avait fait quelques propositions qu’il aurait fallu reprendre. Il était notamment revenu sur les choix faits par l’Assemblée s’agissant de l’Alsace.
Je le dis : l’Alsace pouvait très bien – elle le devrait – rester toute seule. Si j’étais Alsacien, je le demanderais !
Je serais même meurtri de me voir placé dans une grande région que je refuse.
Même après trois lectures, nous ne regretterons jamais assez la logique technocratique qui a conduit à ce qu’une telle carte soit imposée par le haut. Elle aurait très bien pu être construite comme l’ont été les communautés de communes, avec une période probatoire. Les élus s’arrangent localement, l’État n’intervenant que lorsque les choses ne peuvent se faire.
Nous ne voyons pas la clarté et la cohérence de cette carte – en tout cas en ce qui concerne les deux extrémités Ouest et Est. Nous avons amplement parlé – pendant une heure hier soir – de la Bretagne, mais les problèmes ne sont pas réglés et ils ressurgiront, fatalement.
Tout en étant hostiles à la logique de la fusion bloc par bloc, nous avions proposé d’avancer sur la question, en rendant possibles des ajustements démocratiques grâce au droit d’option, garant d’une certaine souplesse. Sur ce point également, il aurait fallu écouter le Sénat, même s’il n’est pas allé aussi loin que nous l’aurions souhaité. Hélas, malgré des votes issus de tous les bancs de cet hémicycle, notamment des députés du groupe majoritaire – essentiellement bretons il est vrai –, conscients de la nécessité de donner davantage de respiration aux territoires, ce même groupe majoritaire a appelé hier soir en catastrophe le ban et l’arrière-ban pour assurer le verrouillage de ce droit d’option, véritable leurre. Une farce, ai-je dit hier soir !
En effet, il faudra obtenir, avant le 31 mars 2019, un accord voté aux trois cinquièmes des deux conseils régionaux concernés et du département. Mission impossible ! Il est étonnant, d’ailleurs, que le Parlement impose aux élus locaux ce à quoi il est incapable d’aboutir, puisque ce texte n’a même pas reçu le soutien de la majorité absolue des députés en deuxième lecture, et qu’il est fort probable qu’il ne l’obtiendra pas davantage cette fois-ci, l’écart semblant très faible !
Ce verrouillage vient confirmer le caractère profondément jacobin du principe qui sous-tend cette réforme : il s’agit de redessiner dans un cabinet ministériel des régions désincarnées, au mépris des territoires et des populations !
Pour construire des régions puissantes, ce ne sont pas tant le poids démographique et la taille du territoire qui importent, mais le sentiment d’appartenance, la volonté d’un destin commun des populations qui y vivent, ainsi que, bien sûr, les compétences, les pouvoirs réglementaires et les moyens financiers.
Or c’est bien ce qui manque aujourd’hui aux régions. Nous espérons que le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République comportera des avancées substantielles sur la capacité financière et sur le pouvoir réglementaire, pouvoir dont dispose la Corse depuis douze ans et qu’elle n’a pu mettre en oeuvre qu’à deux reprises, sans pouvoir aller jusqu’au bout d’ailleurs, ce qui prouve bien qu’il s’agit, là aussi, d’un leurre.
Sans l’ombre d’un doute, une région doit relever les défis d’aujourd’hui grâce à la démocratie, la légitimité, la culture, l’histoire et la volonté qui la fondent. Mais comment espérer cela de régions désincarnées et rejetées, dans certains cas, par la majorité des élus et des populations ?
Pour toutes ces raisons, et en attendant une décentralisation et une régionalisation véritables, le groupe écologiste votera majoritairement contre ce projet de loi qui fait la part belle à l’abstraction technocratique, au détriment de la démocratie territoriale.