Newsletter Mars 2024 : l’éditorial

L’autonomie est un terme qui est bien connu et que l’on emploi de façon positive pour désigner la capacité des personnes à se prendre en charge. Sur le plan administratif, elle désigne des collectivités ou des administrations qui mettent en place, de façon souple et adaptée, des politiques publiques. Le pouvoir est ainsi partagé entre, d’un côté, un Etat central qui assure les pouvoirs régaliens (armée, justice, grands principes et affaires étrangères), l’égalité de traitement entre les citoyens et la péréquation entre zones riches et zones pauvres et, de l’autre, des collectivités locales qui assurent toutes les autres compétences en lien direct avec les populations. Ce modèle d’organisation est celui qu’ont adopté tous nos voisins européens avec qui nous partageons une frontière.

« Nous sommes à la fin d’un cycle »

En France, c’est l’inverse qui s’est produit depuis les lois de décentralisations de 1983 et 1986. L’Etat a rogné l’autonomie des collectivités locales en produisant des règlements, écrits à Paris, tatillons, complexes, et au final très difficiles à appliquer pour les collectivités, les fonctionnaires d’Etat dans les préfectures et les citoyens. De plus, l’autonomie fiscale a été presque totalement supprimée, faisant disparaître des impôts locaux pour les remplacer par des dotations venant directement de l’Etat et qui sont décidées annuellement rendant la gestion des investissements plus compliquée. Les résultats de cette organisation sont connus : perte d’argent, rallongement des délais pour faire les projets, et fatigue, voire exaspération, des élus et des citoyens. Nous sommes à la fin d’un cycle qui a abouti à une thrombose administrative que tout le monde dénonce.

Comment sortir de cette situation très problématique qui use la confiance de nos concitoyens dans les institutions ?  Faire ce que nos voisins font. C’est ce qui est proposé pour la Corse, une île x montagneuse qui possède de nombreuses particularités très difficiles à appréhender, voire impossible, à partir de Paris … La proposition de l’accord entre la collectivité de Corse et le gouvernement va donc dans le bon sens et je la soutiendrai.

« La question d’autonomie n’a jamais cessé »

En Bretagne, le travail sur cette question d’autonomie n’a jamais cessé. La Région a fait part de ses demandes depuis de nombreuses années et nous n’avons pas été entendus. Nous avons donc réitéré, après les élections de 2021, un vœu pour l’autonomie, voté à l’unanimité (sauf le RN). A la suite de ce vœu, un groupe de travail transpartisan a élaboré un rapport pour l’autonomie, voté une fois encore à l’unanimité (sauf le RN) et transmis en septembre dernier à la Première Ministre Elisabeth Borne. La Région Bretagne a été auditionnée à ce sujet au Sénat à l’automne, et son président s’est même entretenu avec le président de cette institution concernant cette demande.

Aujourd’hui, la proposition de la Région Bretagne est d’inscrire dans la constitution, à l’article 73, la faculté pour des collectivités, au sein de notre État hypercentralisé, de pouvoir « disposer d’un statut qui tient compte des intérêts propres de chacune d’elles ». C’est en somme exactement ce qui est à l’œuvre dans les pays de même taille qui nous entourent comme en Espagne, en Italie, en Allemagne ou au Royaume-Uni.

« Une situation qui s’est ankylosée »

Il s’agit là de débloquer une situation qui s’est ankylosée du fait d’une administration hyper centralisée et de rendre efficiente l’action publique en renforçant les capacités d’action des collectivités locales dans l’intérêt des populations résidentes et dans le souci de la préservation des territoires. C’est aussi une question d’égalité car l’organisation actuelle conduit à une prééminence des services et des emplois au profit de Paris. A qui fera-t-on croire que la médecine est la même à Ploërmel ou Redon et à Paris ? On peut aussi souligner que les dotations par habitant sont quatre fois supérieures pour une métropole que pour une commune rurale et que celles attribuées aux régions sont complètement inégalitaires. Pour exemple : la région Bretagne est celle qui a les dotations les plus faibles et Paris les plus fortes.

Quoiqu’en disent les partisans d’une organisation anachronique inspiré de l’Ancien régime et du Bonapartisme, l’hypercentralisation nous conduit à l’inefficacité et à la fatigue démocratique. Qu’ils le veuillent ou non, le débat continuera dans notre région pour savoir si les Bretonnes et les Bretons soutiennent ou non ce statut. Celui-ci ne doit pas être vu comme une finalité mais comme un outil qui permettrait non seulement d’améliorer l’effectivité et l’efficience de l’action publique, mais aussi de redonner une place aux élus locaux, tels des « parlementaires des élus du peuple ».

« Pas un repli sur soi »

En définitive, je ne comprends pas bien pourquoi des peurs sont ainsi agitées ; ou plutôt, je ne perçois pas d’arguments rationnels chez nos opposants. Un projet d’autonomie n’est pas un repli sur soi ou du communautarisme. Il s’agit ni plus ni moins que de l’aboutissement d’un processus démocratique visant à donner aux élus locaux les moyens nécessaires et adéquats pour mettre en place ce pour quoi ils ont été élus.

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